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Chapitre 2
Nous étions parmi les nuages depuis un moment déjà, lorsque mon frère caressa mon flanc du bout de son aile gauche. Je tournai la tête vers lui, puis il abaissa le bec vers la terre pour me montrer quelque chose. Je suivis son regard, et vis que nous étions arrivés au Continent du Feu. Le problème, c’est que nous ne pouvions pas nous permettre d’atterrir comme des fleurs à l’entrée de la capitale de ce continent contre lequel nous sommes en guerre depuis des lustres.
Mes yeux parcoururent rapidement le paysage que j’avais sous les yeux. Mieux valait analyser la situation depuis la terre ferme. Un petit bois se trouvait justement à côté des remparts de pierre : j’attirai l’attention de mon frère, et nous entamâmes la descente avec la Magica celeritas. C’est quelque chose qui est propre aux animaux légendaires pouvant voler, cela nous permet de nous déplacer très vite, de façon à ce que l’on ne nous voit pas. Du moins, seuls les autres qui possèdent ce don peuvent le voir. Bien sûr nous ne pouvions pas y avoir recours sur une très longue distance.
Il était nécessaire de l’utiliser ici, car nous n’étions pas du tout les bienvenus, et, si on nous voyait, nous serions surement exécutés sur-le-champ.
Nous atterrîmes derrière les arbres touffus, et reprîmes notre forme humaine. Je m’accroupis derrière un buisson, et analysai la situation. Deux gardes étaient postés devant la porte d’entrée de la ville la plus proche de nous. Ils ne nous laisseront en aucun cas passer de manière pacifique.
— On aura du mal à passer, marmonnai-je.
— On devrait peut-être, commença mon frère.
Mais il ne finit pas sa phrase. Un bruit mat caractéristique d’une chute suivit d’un gémissement de douleur se fit entendre. Nous nous retournâmes d’un même geste. Si j’avais été dotée d’une quelconque arme, je l’aurais probablement brandie.
Une silhouette se redressa difficilement. Un garçon d’environ notre âge apparut. Il leva vers nous ses yeux couleur rubis, et nous adressa un sourire idiot.
La question sortie toute seule de ma bouche :
— Qui es-tu ?
— Je pourrais te retourner la question. D’autant que vous sembliez comploter pour pouvoir rentrer illégalement dans cette ville, rétorqua-t-il en faisant un mouvement de tête vers les remparts.
— Es-tu un citoyen du Continent du Feu ? demanda mon frère en se redressant.
— Non. Mais un allié, disons, sourit l’inconnu aux yeux rouges et aux cheveux blancs.
— Pourquoi te cachais-tu dans cet arbre ?
— Je vous ai vus descendre, et j’étais curieux de savoir pourquoi vous vous cachiez.
— Tu nous as vus ? m’étonnai-je. Ton animal est… ?
L’adolescent se remit debout et enleva les feuilles accrochées à ses vêtements.
— Phénix, mais pas pour vous servir, fit-il en souriant malicieusement.
L’information mit du temps à faire le tour de mon cerveau. Ethan prit la parole :
— Phénix ? C’est toi, Phénix ?
— En effet.
— As-tu une Âme sœur ?
— Pas que je sache, fit-il en haussant les épaules. Pourquoi ?
— Nous recherchions Phénix, avoua mon frère.
Un autre sourire moqueur s’afficha sur le visage de Mister Rubis.
— Je sais.
— Tu… sais ?
— Vous êtes Pégase et Griffon. Je sais que vous me cherchiez, et je vous cherchais aussi. Par ailleurs, continua-t-il en remettant ses cheveux en place, nous sommes venus ici pour la même raison : trouver Licorne et Dragon.
— Tu n’as pas pu ramener l’autre avec toi ? Cygne ? demandai-je.
— Non, il est en prison. On m’a dit que ce serait le Sage du Continent de l’Eau qui se chargerait de sa libération. En attendant, on m’a demandé de trouver les autres élus.
— Très bien. Maintenant, que nous sommes alliés, tu pourrais peut-être nous dire ton nom ? dit Ethan.
Mister Rubis haussa les sourcils, puis dit :
— Angel Ignisavis. Et toi Griffon ?
— Ethan Alatus. Voici ma sœur Edwige.
— Enchanté, Pégase. Bon, vous avez une idée pour rentrer ?
— Tu ne peux pas user de ton identité ? Tu viens du Continent du Vent, après tout.
— Oui. Mais vous ne voulez pas venir avec moi à l’intérieur ? Vous êtes des peureux, se moqua Angel.
— On y va, rétorquai-je du tac au tac.
Mon frère soupira.
Nous sortîmes du couvert des bois, et nous dirigeâmes vers les deux gardes. Lorsqu’ils nous virent, ils croisèrent d’un même geste leurs lances devant la grande porte afin de nous empêcher de passer.
— Identitas, grogna l’un d’eux.
Mister Rubis sortit alors de sa poche une petite carte de couleur verte. Sur Terre, c’était l’équivalent d’une « carte d’identité ». On y marque le nom, le lieu de résidence, la date naissance et l’animal du propriétaire, ainsi qu’une photo.
Le garde hocha la tête
— C’est bon. Et vous ? fit-il en tournant ses petits yeux sombres vers nous.
— C’est bon, ils sont avec moi, tenta Angel.
Je priai pour que le garde soit inconscient ou idiot et se laisse avoir.
Mais non.
— Identitas, insista-t-il.
Mal à l’aise, Ethan et moi sortîmes nos Identitas. Le garde n’eut même besoin de lire ce qui était inscrit : la couleur bleue de la carte, caractéristique du Continent de l’Eau, nous trahit.
— Vous ne passerez pas ! s’exclama-t-il.
— Nous ne sommes pas venus en ennemis ! Nous sommes…
— Tous les citoyens du Continent de l’Eau sont des ennemis !
— Attaquez alors, si vous n’êtes pas des mauviettes, sourit Angel.
Je lui jetai un regard en coin. Pourquoi il cherchait les ennuis ? Il est complètement abruti ce garçon.
Le gardien de gauche claqua des doigts. Une multitude de gros cobras surgirent du sol en sifflant. Mister Rubis bougea tellement rapidement que j’eus à peine le temps de reconnaître la Danse Ailée. Dans un scintillement de paillettes rouges et or, il se transforma en un grand oiseau au plumage flamboyant. D’un battement d’aile, il envoya des flammes sur les serpents venimeux. Une odeur âcre de brûlé se répandit dans l’air, et une fumée noire nous boucha la vue. Alors, surgit de derrière l’écran de fumée, un gros ours me sauta dessus et me plaqua au sol, s’empressant d’immobiliser mes bras. Je ne pouvais pas me transformer, ni utiliser d’autres sorts sans l’usage de mes jambes et de mes bras. Je donnai alors rageusement, l’adrénaline se répandant dans mon corps, des coups de pieds dans le ventre poilu de la bête, sans succès.
Je pouvais voir sa grosse bouche se fendre en un sourire victorieux -je ne savais pas que les ours souriaient...-. Il ouvrit celle-ci, découvrant de grosses dents qui me déchiquèteraient en quelques secondes, et visa ma gorge. Je me sentais comme une de ces pauvres souris sous l’emprise d’un gros matou affamé.
Mais, un bruit détourna son attention de ma jugulaire.
Soudain, la fumée noire tomba, et je fus trempée jusqu’aux os. Un grondement jaillit devant moi à gauche, et mes yeux d’écarquillèrent. Un immense dragon ailé se trouvait là, un filet d’eau coulant le long de sa mâchoire. Il fixait les deux gardes de ses yeux sombres. La garde aux serpents gémit :
— Miss Emily !
Une jeune fille prit alors la place du dragon. Elle avait de longs cheveux noir de jais attachés en une queue de cheval, des yeux tout aussi sombre, et une peau blanche comme la neige. Elle prit la parole :
— Laissez-les rentrer.
— Mais, ils sont du Continent de l’Eau, Miss…
— Ordre de mon père, insista-t-elle. Il a été prévenu de leur arrivée.
— Mais…
— C’est un ordre, cracha-t-elle agressivement.
Les deux gardes se regardèrent et s’éloignèrent à contre cœur, murmurant à voix basse.
La fille soupira, et se tourna vers nous.
— Veuillez les excuser. Nous vous attendions.
— Tu es… ? fit mon frère.
— Emily Pluvia, alias Dragon, répertoire Aqua, dit-elle d’un seul coup.
— Tu as un répertoire ? m’étonnai-je.
— Comme tous les élus, patate, lâcha Mister Rubis qui avait repris sa forme humaine.
Ethan et moi nous échangeâmes un regard perdu.
— Tous les élus ? répéta-t-il.
— Evidemment, fit Angel, manifestement content de pouvoir étaler ce qu’il savait devant nous. Vous ne saviez même pas que vous étiez la famille du vent ? Pourtant, les Alatus sont connus pour leur répertoire, cela m’étonne que vous n’en sachiez rien.
Nous ne connaissions pas nos parents. Et l’école ne nous disait jamais rien, c’est dire, si on ne l’avait pas découvert par hasard, nous n’aurions jamais su que nous avions des animaux légendaires. C’est pour cela que cette révélation ne m’étonnait qu’à peine.
— Ton répertoire à toi, c’est ? fit Emily en fixant Angel.
— Feu, répondit celui-ci en s’étirant, comme si c’était normal d’avoir un répertoire d’incantations de niveau deux.
— Kiara a la terre, continua la jeune fille aux cheveux sombres.
— Kiara ?
— Licorne, si vous préférez.
— Tu la connais ? fis-je, constatant que cela nous éviterait des heures de recherches.
— Evidemment, c’est l’une de mes servantes.
— Tu as un membre de la famille Terra comme servante ? s’indigna l’abruti aux yeux rouges.
— Nous l’avons adoptée, nourrit et logée, expliqua Emily avec un regard froid. Ses parents avaient mystérieusement disparus, et il était dangereux pour elle de vivre seule. Bon, vous avez l’intention de camper ici ou on va la chercher ?
Nous la suivîmes alors à l’intérieur de la ville.
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Juste pour vous dire, mais les noms de famille des personnages viennent de mots latins ~~
Ignis avis = oiseau de feu
Alatus = ailé
Pluvia = pluie
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Commentaires
Pour les sourires, j'ai déjà vu ça écrit dans des livres il me semble xD Enfin, j'ai peut-être mal lu.
AHAH //mur// en lisant un de mes bouquins, je suis tombée sur cette phrase « Le sourire dans les yeux de Daniel s'évanouit. » comme quoi je disais pas que des trucs chelous :')
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En dehors du fait qu'il n'y a pas de sourires dans les yeux de quiconque (c'est impossible. Les yeux peuvent sourires -si si- mais en aucun cas avoir des sourires en leur intérieur), j'ai bien aimé ce chapitre c: